A) Collaboration avec l’Unité INSERM 316 – Equipe prématuré et développement cérébral - Pr. E. Saliba – Hôpital Clocheville- Tours
En raison du retour de Madame Margot Taylor à l’université de Toronto en 1996, Monsieur le Pr. E. Saliba nous a proposé de venir mener des recherches, dans le laboratoire de psychophysiologie cognitive crée par cette dernière, au sein de son équipe INSERM. Notre tâche a été de contribuer à la compréhension des difficultés cognitives rencontrées par les enfants nés prématurés dans leur apprentissage scolaire. Dans ce cadre, Nous avons eu à co-dirigé avec Monsieur le Pr. H. Stauder, à l’époque Professeur associé à l’université de Montréal puis de Maastricht, une thèse réalisé dans l’école doctorale dirigée par Monsieur le Pr. M. Jeannerod à Lyon. Ce travail de thèse a été réalisé par Monsieur Rémi Dupin de 1997 à 2000 et soutenu publiquement en Octobre 2000 sous le titre : « Stratégies attentionnelles de l’enfant prématuré : apport des potentiels évoqués cognitifs » Ce travail a donné lieu à une publication: Dupin, R., Laurent, J. P., Stauder, J. and Saliba, E. (2000). "Auditory attention processing in 5-year-old children born preterm: evidence from event-related potentials." Dev. Med. Child Neurol 42(7): 476-80
Nous avons poursuivi cette activité de recherche grâce à un appel d’offre intitulé « Recherche clinique - Hôpital promoteur 2001» qui a permis une collaboration avec Mesdames M. Gomot et N. Bruneau appartenant à l’équipe Autisme et Troubles apparentés : Psychopathologie et Physiopathologie INSERM U320 ainsi que deux autres collègues M.-H Giard et O. Bertrand membre de l’équipe Perception auditive et intégration audio-visuelle : organisation neuroanatomique et fonctionnelle de l’INSERM U280 à Lyon. Cette collaboration nous a conduit à réaliser une étude électrophysiologique des processus pré attentionnels chez des enfants âgés de 9 ans grands prématurés qui a donné lieu à une publication:
Gomot, M., Bruneau, N., Laurent, J.-P., Bathélémy, C. and Saliba, E. (2007). "Left temporal impairment of auditory information processing in prematurely born 9-year-old children: an electrophysiological study." International Journal of Psychophysiology 64(2) : 123-129
B) Collaboration avec l’équipe de recherche Universitaire du Pr. Hardy-Baylé – Hôpital Mignot – Versailles
Nous avons été contacté au printemps 1995 par Madame le Pr. M-C. Hardy-Baylé qui nous a proposé une collaboration sous la forme de la création, au sein de son équipe universitaire de recherche, d’une unité de potentiel évoqué cognitif. Nous avons pu ainsi étudier au moyen des potentiels évoqués cognitifs le lien entre la désorganisation de la pensée et les troubles de l’utilisation du contexte dans l’accès au sens chez des patients schizophrènes, présentant des troubles formels de la pensée. Cette problématique découlait d’un modèle proposé par le Pr. Hardy-Baylé (Hardy-Baylé, Sarfati et al. 2003). La tâche expérimentale que nous avons utilisée le plus communément est la tâche de décision lexicale. La modulation de la composante N400 du potentiel évoqué a été l’indice psychophysiologique que nous avons étudié. Une série de travaux, le premier ayant été réalisé à la clinique de Chailles, a eu lieu sur ces problématiques entre 1995 et 2006. Notre tâche a été de former les étudiants, qui sont venu au laboratoire pour préparer leur mémoire de DEA ou leur thèse de doctorat, d’une part à la technique d’enregistrement, d’autre part aux méthodes d’analyse et de traitement et enfin aux méthodes d’interprétation des composants du potentiel évoqué cognitif et de leur modulation (lien cérébro-cognitif). Deux travaux de thèse et 7 mémoires de DEA ont ainsi été réalisés dans ces conditions :
Thèse de Madame M. Kostova (Décembre 2002) : Approche électrophysiologique des processus élémentaires de contextualisation en lien avec des troubles de la communication dans la schizophrénie – Université Paris 8 - collaboration.
Thèse de Madame G. Iakimova (Décembre 2003) : La compréhension du langage figuré dans les troubles schizophréniques. Apports de l’approche électrophysiologique à la psychopathologie et aux modèles psycholinguistiques de l’accès au sens figuré – Université de Paris 8 - collaboration
DEA « Neurobiologie et psychopathologie du développement et des comportements » (Université Paris 6) présenté par Stéphanie Laffont-Rapnouil (juin 1996) : Evaluation de l’activité cérébrale de sujets schizophrènes, confrontés à une tâche de décision lexicale, à l’aide des potentiels évoqués cognitifs - collaboration
DEA « Neurobiologie et psychopathologie du développement et des comportements » (Université Paris 6) présenté par Marc Nartowski (juin 1997) : Etude électrophysiologique de l’effet de la structuration du contexte sur les processus élémentaires d’intégration sémantique chez les patients schizophrènes – collaboration
DEA « Neurobiologie et psychopathologie du développement et des comportements » (Université Paris 6) présenté par Catherine Saint-Georges (Juin1998) : Influence locale et globale de contextes phrastiques linguistiques sur la N400 chez des sujets schizophrènes". - collaboration
DEA « Neurobiologie et psychopathologie du développement et des comportements » (Université Paris 6) présenté par Delphine Bathélémy (juin 1999) : Etude de la spécificité et du statut trait ou état des anomalies des indices électrophysiologiques P300 et N400, dans les troubles schizophréniques – collaboration
DEA « Neurobiologie et psychopathologie du développement et des comportements » (Université Paris 6) présenté par Galina Iakimova (juin 1999) : Evaluation de l’effet d’un contexte phrastique comportant ou non une expression métaphorique sur la composante N400 des potentiels évoqués cognitifs chez des schizophrènes désorganisés. - collaboration
DEA « Psychologie clinique et psychopathologique » (Université Paris 8) de Miléna Kostova (juin 2000) : Les troubles du traitement du contexte, chez les schizophrènes, sont-ils fonctionnels ? Une étude électrophysiologique – collaboration
Ces recherches en collaboration ont permis 4 publications :
Kostova, M., Passerieux, C., Laurent, J.-P. and Hardy-Baylé, M.-C. (2005). "N400 anomalies in schizophrenia are correlated with the severity of formal thought disorder." Schizophrenia Research 78(2-3): 285-291.
Iakimova, G., Passerieux, C., Laurent, J. P. and Hardy-Baylé, M.-C. (2005). "ERPs of metaphoric, literal and incongruous semantic processing in schizophrenia." Psychophysiology 42(4): 380-90.
Kostova, M., Passerieux, C., Laurent, J. P., Saint-Georges, C. and Hardy-Baylé, M. C. (2003). "Functional analysis of the deficit in semantic context processes in schizophrenic patients: an event-related potentials study." Neurophysiologie Clinique/Clinical Neurophysiology 33(1): 11-22.
Kostova, M., Passerieux, C., Laurent, J.-P. and Hardy-Baylé, M.-C. (2003). "An electrophysiologic study: Can semantic context processes be mobilized in patients with thought-disordered schizophrenia?" Canadian Journal of Psychiatry 48(9): 615-623.
C) Collaboration avec G. Denhière UMR 6561 – CNRS Laboratoire de Psychologie Cognitive Université Aix-en-Provence – Marseille
Un contrat dans le cadre d’un projet cognitique « langage et cognition » a été réalisé avec le concours de 3 équipes de recherche sous la direction du Dr Christine Passerieux entre 2000 et 2002. Cette collaboration a impliqué les 3 équipes suivantes :
- Le Laboratoire Universitaire de Recherche du Pr. Hardy-Baylé Hôpital Mignot
- L’ Equipe de Recherche en Psychologie Clinique (Pr. A. Blanchet) U.F.R. de psychologie, Université Paris8
- Le Laboratoire de psychologie cognitive – UMR 6561 au CNRS (Guy Denhière) Université de Provence.
Ce projet qui avait pour titre : « Troubles du langage figuré dans les troubles schizophréniques : étude électrophysiologique de la compréhension d’expressions idiomatiques chez les sujets schizophrènes et les sujets sains. » a porté sur la compréhension des expressions idiomatiques, considérée comme un moyen privilégié d’exploration du sens figuré. L’objectif principal, à la suite des premiers travaux de G. Denhière, était de confronter les prédictions dérivées de 2 modèles d’accès au sens figuré en mettant en oeuvre à la fois des mesures comportementales telles que les temps de décision lexicale et des mesures d’imagerie cérébrale telles que les potentiels évoqués cognitifs et en étudiant des populations différentes : personnes adultes de contrôle et schizophrènes stabilisés.
Cette coopération a amené la participation de plusieurs étudiants dont l’une a soutenu une thèse et un autre un mémoire de DEA :
Thèse de Madame G. Iakimova (Décembre 2003) : La compréhension du langage figuré dans les troubles schizophréniques : apport de l’approche électrophysiologique à la psychopathologie et aux modèles psycholinguistiques de l’accès au sens figuré –Université Paris 8- collaboration
DEA « Neurobiologie et psychopathologie du développement et des comportements » (Université Paris 6) présenté par Jeanne Vilain (septembre 2005) : Analyse électrophysiologique de l’effet de saillance sur les processus de compréhension du langage figuré chez les sujets schizophrènes – co-tuteur
Par ailleurs un article issu de cette recherche a été publié :
Laurent, J.-P., Denhieres, G., Passerieux, C., Iakimova, G. and Hardy-Baylé, M.-C. (2006). "On understanding idiomatic language: The salience hypothesis assessed by ERPs." Brain Research 1068(1): 151-160.
D) Notre rôle spécifique dans ces collaborations
Méthodologie des potentiels évoqués cognitifs
L’électrophysiologie cognitive
Notre thèse de 1991 avait montré notre savoir faire dans l’utilisation des potentiels évoqués pour étudier les troubles cognitifs en psychopathologie. Nous étions devenu familier dans l’adaptation de certains paradigmes expérimentaux (tâche d’écoute dichotique, tâche de décision lexical, …) à son utilisation avec cette technique récente à l’époque. Il nous apparaissait de plus en plus clairement dans chaque nouvelle recherche, qu’il s’agissait de nouer trois plans différents: celui de l’électrophysiologie à celui de la cognition (lien neuro-cognitif), celui de la cognition à celui de la psychopathologie (lien cognitivo-clinique) et celui de la psychopathologie au corps (lien somato-clinique)[1]. Travailler sur les difficultés cognitives des enfants nés prématurés ou sur celles des patients schizophrènes posait un problème méthodologique semblable : comment penser ce nouage ? Notre apport personnel, dans chacune des collaborations que nous venons de décrire, a donc été d’utiliser la technique de l’électrophysiologie cognitive pour opérationnaliser un de ces liens (neuro-cognitif: comment la matrice cérébral est-elle engagé dans la tâche cognitive ?) pour comprendre le second (lien cognitivo-clinique: comment le dysfonctionnement cognitif est il relié au syndrome clinique ?) et pouvoir faire des inférences sur le dernier (lien somato-clinique: en quoi le corps est-il en cause dans le syndrome clinique ?).
Le traitement statistique des données
Dans tous les travaux, auxquels nous avons collaboré, les plans expérimentaux utilisés étaient des plans mixtes : le facteur intergroupe contrastait un groupe de sujet sain à un ou plusieurs groupes présentant une pathologie que nous avions choisi d’étudier. Par ailleurs, les autres niveaux de la ou des variables indépendantes, que nous manipulions, étaient donnés comme facteur(s) intragroupe(s). Notre tâche, à ce point là, a consisté à définir les stratégies statistiques qu’il convenait de mettre en place. En particulier nous avons eu à articuler les analyses multivariées (généralement des MANOVA[2] à mesures répétées, parfois des MANCOVA) aux analyses univariées ou aux comparaisons planifiées. Ainsi, l’utilisation de plusieurs électrodes, pour recueillir les potentiels évoqués, conduit à avoir, lors de l’analyse statistique, un facteur intra-sujet à plusieurs niveaux pour lequel les mesures enregistrées ne peuvent être considérées comme indépendantes (par exemple l’amplitude ou la latence mesurée sous une électrode peut influencer celles prise sous une autre proche) ce qui nous a conduit à traiter les données dans une MANOVA.
Par ailleurs, lorsque l'hypothèse de départ conduit à la décomposition de 2 degrés de liberté, associés à la source de variation, un traitement selon des contrastes planifiés doit être effectué de manière à pouvoir accepter ou rejeter l'hypothèse que l’on teste.
Enfin les traitements chimiothérapiques pris par les patients posent un redoutable problème lors des analyses statistiques. En raison de la prise des plusieurs substances médicamenteuse chez le même patient ou de substances différentes chez plusieurs patients, les traitements sont exprimés en milliéquivalent d’un produit de référence. Cela se traduit par une grande variance inter-sujet de la mesure de cette variable de contrôle. Dans cette situation, j’ai préconisé que la mesure des traitements soit analysée comme une co-variable dans une MANCOVA.
L’interprétation des données dans le plan cérébro-cognitif
Une autre spécificité de notre abord réside dans l’interprétation, que nous avons proposée des données recueillies dans mes différentes collaborations. Ces données issues de l’analyse de l’amplitude, de la latence, de la modulation ou de la topographie des composantes du potentiel évoqué permettaient de s'interroger sur l'implémentation des traitements cognitifs dans la matrice cérébrale, c'est-à-dire de descendre du niveau cognitif au niveau neuronal. Les variations des stratégies cognitives pouvaient, dans l’étude des résultats des patients, résulter de modifications diverses des propriétés de la matrice cérébrale. Ces modifications se manifestaient dans les différences de modulation et/ou de topographie, entre les différents groupes de sujets, mises en évidence par l’analyse statistiques. En raison de l'organisation fonctionnelle du système nerveux central, une lésion entraîne des changements dans les stratégies cognitives qui reflètent négativement l'effet de cette lésion, mais aussi qui manifestent positivement l'expression de certains traitements cognitifs qui étaient indécelables pour l'observateur avant l'atteinte cérébrale. Dans ces situations, certains traitements cognitifs pouvaient être parfois d'une plus grande magnitude que ceux qui étaient observés chez les sujets de contrôle. Cette démarche impose de tenir l’analyse cognitive comme un maillon explicatif intermédiaire indispensable entre le comportement et le cerveau. Dans cette perspective, une tâche expérimentale est utilisée pour sa capacité à mettre en jeu des processus cognitifs pour lesquels le chercheur postule un lien entre l'altération des résultats à cette tâche et un dysfonctionnement cérébral.
[1] Pour plus de détails voir mon article : Laurent, J.-P. (2004). Apport de la neuropsychologie cognitive à la compréhension des difficultés d'apprentissage scolaire des enfants nés prématurés. Neuropsychologie Cognition et développement de l'enfant. P. Nollin and J.-P. Laurent. Sainte-Foy (Quebec), Presses de l'Université du Quebec. 9: 109-134.
[2] MANOVA Multivariate Analysis of Variance: Analyse Multivariée de Variance, MANCOVA Multivariate Analysis of Covariance : Analyse Multivariée de la Covariance